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Refus de la convention : pourquoi les médecins n’ont-ils pas signé ?


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Le 28 février marquait la fin des négociations entre la Cnam et les syndicats médicaux pour la signature d’une nouvelle convention médicale. Après l’échec des négociations, l’arbitre désigné par les pouvoirs publics a 3 mois pour rédiger le règlement arbitral qui fera force de loi jusqu’à la signature d’une nouvelle convention.


La convention médicale régit les liens entre les médecins libéraux et l'assurance maladie. Négociée tous les 5 ans par l'UNCAM et les syndicats représentatifs des médecins libéraux (élus lors des élections aux URPS), elle organise la régulation des tarifs des actes médicaux, y compris ceux des consultations et prévoit en échange la prise en charge d’une partie des cotisations des médecins (assurance maladie, assurance vieillesse).


La convention signée en 2016 devait arriver à son terme le 31 décembre 2021. Du fait de la crise sanitaire, les négociations avaient été reportées à l’hiver 2022 avec une signature prévue au plus tard le 28 février 2023.


Elles devaient notamment déterminer de nouvelles modalités facilitant le déploiement des Equipes de Soins Spécialisés qui permettent aux spécialistes libéraux de s’organiser sur leur territoire pour améliorer l’accès des patients aux consultations de spécialités


En savoir plus sur les Equipes de Soins Spécialisés : Article Juin 2022 et Article Février 2023


Plusieurs éléments permettent d’expliquer l’échec des négociations engagées début novembre :

  • Alors que les négociations doivent se dérouler entre l’assurance maladie et les syndicats, les parlementaires ont contourné le dispositif. En effet, la députée Stéphanie Rist a déposé en janvier une proposition de projet de loi (PPL) prévoyant d’autoriser l’accès en premier recours aux I.P.A., et de leur permettre d’établir un primo-diagnostic et de prescrire un premier traitement aux patients. Or, s’ils sont formés pour suivre des patients chroniques stabilisés, les I.P.A. n’ont pas vocation à traiter des pathologies d’urgence ni à pouvoir être consultés en premier recours. Par ailleurs, un amendement proposé dans le cadre de cette PPL par le député Valletoux posait le principe de la responsabilité collective de participation à la permanence des soins, ce qui revenait à revenir à l’obligation de garde supprimée en 2002. Or les médecins libéraux effectuent déjà la majorité des gardes … sans repos compensatoire rémunéré le lendemain ce qui les obligent à enchaîner les journées de travail ou à renoncer au chiffre d’affaires d’une journée. Cet amendement a cependant été retiré par son auteur.

  • Autre point d’achoppement, si les revalorisations proposées par la Cnam représentaient 1,5 milliards d’euros, 70% étaient destinés à la médecine générale. De plus ces revalorisations ne devaient intervenir qu’à compter d’octobre 2024.

  • Par ailleurs le Contrat d'Engagement Territorial (C.E.T.) proposé par la Cnam laissait près de 70% des spécialistes en dehors des revalorisations tarifaires alors que l’on continue à financer massivement le secteur public sans pour autant répondre aux besoins de la population.

  • Enfin et surtout, les syndicats médicaux ont jugé que les propositions faites par la Cnam ne permettraient pas d’optimiser l’exercice de la médecine spécialisée ni de lutter contre la désertification médicale ni encore moins de redonner de l’attractivité au métier. Or la médecine de ville, notamment la médecine de spécialité, doit s’inscrire dans le système de santé pour que les médecins jouent pleinement leur rôle de prescripteurs et de coordinateurs de parcours. En effet, notre système hospitalo-centré, conçu pour prendre en charge des pathologies aigues, n’a pas la capacité de répondre aux besoins d’une population vieillissante souffrant de pathologies chroniques et nécessitant de ce fait des équipes de soins coordonnées et en proximité immédiate.


Les négociations conventionnelles ayant échoué, la solution du règlement arbitral s’impose.


En cas de rupture des négociations préalables à l’élaboration d’une convention ou d’opposition à la nouvelle convention, un arbitre arrête un projet de convention ou d’accord dans le respect du cadre financier pluriannuel des dépenses de santé (article L162-14-2 du Code de la Sécurité Sociale).


Ce projet de convention est appelé un règlement arbitral. Il assure le remboursement des assurés en l’absence de convention. S’il est pris pour une durée de 5 ans, les partenaires conventionnels doivent engager de nouvelles négociations dans les deux ans.


Le règlement arbitral peut reprendre la convention en cours c’est souvent le cas ou mettre en œuvre des mesures proposées par la convention refusée par les syndicats.


L’arbitre a été désigné avant le début des négociations : il s’agit d’Annick Morel, inspectrice générale honoraire des affaires sociales (Igas). Elle a présidé la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) et le Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance maladie (HCAAM). Les syndicats avaient accepté sa nomination proposée par la Cnam. Mme Morel a 3 mois (à partir de sa prise de fonction) pour transmettre un projet de règlement arbitral. Au cours de ce délai, elle va rencontrer et entendre les représentants de l’assurance maladie et des syndicats représentatifs. Elle peut toutefois se passer de leur accord, alors que celui des ministres chargés de la Santé et de la Sécurité sociale est indispensable pour activer le règlement arbitral.


A noter que les médecins pourront refuser le cadre imposé par le règlement arbitral, ce qui revient à sortir de l’accord conventionnel. Leurs patients ne seront alors plus remboursés. C’est la solution actuellement prônée par certains responsables syndicaux pour faire pression sur les pouvoirs publics.

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